Repensons l'efficacité énergétique dans les bâtiments : les occupants comme moteurs d’économies d’énergie

L’implication active des occupants dans le fonctionnement écoénergétique des bâtiments est un élément essentiel, souvent sous-estimé, des stratégies de gestion immobilière durable. Contrairement au domicile privé, où la facture d’électricité ou de chauffage incite à économiser l’énergie, d'autres approches sont nécessaires pour sensibiliser et motiver les utilisateurs dans les bâtiments tertiaires, comme des immeubles de bureaux ou administratifs, par exemple. La transparence, une communication ciblée et des systèmes de récompense avec des incitations concrètes peuvent transformer les utilisateurs et occupants en véritables moteurs d’économies d’énergie, permettant ainsi d'atteindre un bâtiment plus respectueux de l’environnement et plus efficace.

Défis principales

Impliquer les occupants dans des mesures d’économie d’énergie dans des bâtiments tertiaires soulève des défis complexes d’ordre comportemental et psychologique. Par exemple, une forme de réactance peut apparaître lorsque les individus perçoivent les incitations externes à économiser l’énergie comme une atteinte à leur liberté personnelle. Il faut également prendre en compte la tendance humaine à s’accrocher à ses habitudes et à ce qui est familier. Selon l’Institut de l’économie allemande (IW), cette tendance persiste même lorsque des bénéfices potentiels sont proposés.

Il est également important de considérer que, dans les complexes immobiliers, les décisions individuelles sont souvent influencées par les actions des autres. Si ces conditions sont prises en compte dans une stratégie durable, alors toute une série de mesures efficaces peut être mise en œuvre pour inciter activement les usagers à économiser de l’énergie.

Sensibilisation et transparence comme leviers de changement comportemental

La transparence sur la consommation d’énergie et les potentiels d’économies existants constitue la base essentielle pour induire un changement dans l’usage énergétique des grands bâtiments. Des usagers bien informés sont en effet beaucoup plus enclins à réduire l’impact environnemental de leurs comportements et à éviter le gaspillage. La communication de données sur la consommation actuelle ou sur les possibilités d’économie les plus importantes permet déjà de sensibiliser efficacement les occupants et visiteurs. Ce n’est qu’avec les bonnes informations qu’ils seront à même d’agir concrètement sur le bilan énergétique d’un bâtiment.

Exemple : Le Kaiser Hof à Cologne

Dans le cadre du projet subventionné « SmartCity Cologne GO », aedifion a élaboré pour l’immeuble de bureaux Kaiser Hof de Cologne, en Allemagne, un concept de visualisation destiné à informer les occupants et visiteurs du bâtiment sur leur consommation d’énergie et leurs émissions. En complément, l’affichage fournit des conseils personnalisés pour réduire davantage cette consommation. L'installation crée ainsi, sans grand effort et avec un appui technologique, une incitation intuitive à adopter un comportement plus responsable en matière d’énergie.

Il est crucial dans ce contexte de mettre les données à disposition de chaque groupe cible de manière structurée :

• Les gestionnaires d’actifs immobiliers ont besoin d’un tableau de bord affichant des indicateurs ESG tels que la consommation d’énergie, la satisfaction des locataires ou les émissions de CO₂ avec des valeurs de référence.
• Les responsables d’exploitation ou les responsables de la gestion immobilière peuvent quant à eux bénéficier d'un code couleur type « feu tricolore » pour identifier rapidement les installations nécessitant une intervention.
• Les visiteurs doivent disposer de données de consommation simples et compréhensibles par tous.

Mécanismes d’incitation

Feedback en temps réel

Lorsque les occupants voient en temps réel les effets de leurs actions sur la consommation d’énergie d’un bâtiment, cela peut suffire à les inciter à modifier leur comportement pour réduire cette consommation. Si les effets positifs sont également visibles en temps réel, cela agit comme un mécanisme immédiat de récompense. Les données nécessaires peuvent être précisément captées et visualisées grâce à des solutions logicielles et des systèmes d’automatisation du bâtiment adaptés.

Motivation et inspiration via des systèmes d’incitation

Les incitations peuvent être multiples. Dans les bâtiments à usage professionnel, des récompenses financières ou une reconnaissance sociale peuvent par exemple motiver les usagers à faire des économies. Un exemple est le « système de propositions d’amélioration » intégré au processus de gestion des idées d’une entreprise, où les collaborateurs peuvent soumettre des suggestions visant à économiser l’énergie. Les meilleures idées sont récompensées par des primes, souvent calculées en fonction des économies réalisées, afin de garantir une incitation durable. Plus la reconnaissance des comportements vertueux est ouverte et directe, plus l'incitation est forte.

Décision participative

Inclure les occupants dans les décisions par le biais d’enquêtes ou d’ateliers augmente généralement l’acceptation des changements et renforce la responsabilité individuelle. Les personnes impliquées dans les décisions liées à l’efficacité énergétique sont plus enclines à accepter et à appliquer ces mesures que si les décisions leur sont simplement imposées.

« Nudging » : motiver sans contrainte

Le réseau d’entreprises pour la protection du climat en Allemagne décrit des mesures de motivation qui ne nécessitent ni récompense financière ni reconnaissance sociale : le « nudging » (ou coup de pouce) suffit à induire un changement de comportement. Un exemple simple est celui des smileys (heureux ou tristes) que l’on connaît des radars pédagogiques installés sur les routes. Ce concept peut facilement s’appliquer à l’économie d’énergie dans les bâtiments, par exemple pour inciter à bien fermer les portes afin d’éviter les pertes de chaleur, ou à éteindre la lumière dans une pièce vide. Il ne s’agit pas d’un ordre ou d’une interdiction, mais d’une suggestion subtile. Ce type de stimulation permet justement d'éviter la réactance mentionnée plus haut, car il n’y a pas de punition en cas de non-conformité.

Gamification

On parle de gamification lorsque des mécanismes de jeu sont utilisés pour atteindre des objectifs. Par exemple, un quiz sur les comportements durables peut s'avérer bien plus efficace qu’une présentation directive. Une autre stratégie consiste à créer une motivation par la comparaison : permettre aux utilisateurs de comparer anonymement leur consommation d’énergie peut déclencher un esprit de compétition qui pousse chacun à faire mieux. Un projet pilote suédois, décrit par l’Institut de l’économie allemande, a démontré que des familles ont pu réduire leur consommation d’énergie jusqu’à 28,8 % sur une période donnée.

Tout aussi important que la participation : des paramètres par défaut adaptés et une automatisation intelligente

Un simple ajustement ponctuel des paramètres par défaut, par exemple des réglages mécaniques ou électriques sur les robinets ou les thermostats dans le bâtiment, peut produire des effets durables sans nuire au confort des usagers.

Un pilotage intelligent et prédictif des installations techniques du bâtiment est encore plus efficace. Par exemple, la solution numérique aedifion.controls est basée sur l’intelligence artificielle dans le cloud qui contrôle intelligemment les systèmes techniques du bâtiment en fonction des besoins, des prévisions météorologiques et du taux d’occupation. Cela permet d’assurer en permanence un fonctionnement optimal, équilibré entre rentabilité, durabilité et satisfaction des locataires.